Vienne qui pourra

Lors du congrès ANCOVART à Lyon, en plus d’aller rendre visite à une ancienne collègue au Monastère royal de Brou, cela fut aussi l’occasion de rendre visite à une amie habitant et travaillant sur Vienne 😊. Un séjour qui se compose de retrouvailles mais aussi de la découverte de la ville et du CIAP (Centre d’Interprétation d’Architecture et du Patrimoine) de Vienne.

Il ne faut pas aller très loin pour découvrir le passé de la ville depuis son logement, parce qu’en sortant par l’arrière du bâtiment, nous nous retrouvons face au théâtre antique, qui une fois en haut permet d’avoir une vue d’ensemble sur la ville.

Mais revenons à nos moutons pour découvrir le théâtre. Depuis les sommets, nous dominons la scène (orchestra) d’une trentaine de mètres.

Le théâtre de Vienne (construit au 1er siècle ap. J.C) est l’un des plus grand du monde romain avec : 129.8 mètres de diamètre et il pouvait accueillir jusqu’à 11 000 personnes. La période antique achevée, le lieu traverse une longue période d’oubli entre le 4e siècle et le début du 20e siècle. Il est abandonné parce que les spectacles de théâtre sont à la fois réprouvés par l’Église et interdit par les empereurs. Il deviendra une carrière de pierre et un dépotoir, les vestiges s’enfouissant petit à petit sous la terre et les jardins qui seront aménagés sur les terrasses. Il faudra attendre 1922, pour voir le théâtre intéresser à nouveau, avec un dégagement progressif. Ces travaux se poursuivent jusqu’en 1947.

Quelques informations historiques permettant de comprendre l’importance de la ville dans le monde romain ainsi que celle du théâtre.

Un axe est créé sur les deux rives du Rhône où s’installe Vienne. Autour du théâtre antique, nous pouvions retrouver les édifices hérités du monde grec : le stade où se déroulaient les courses, les combats et les lancers ; l’odéon (où chants et poèmes étaient déclamés pour les spectateurs) ; le cirque accueillant les courses de char et entre 15 000 et 20 000 spectateurs. En revanche, aucune attestation de la présence d’un amphithéâtre à Vienne où avait lieu les combats de gladiateurs et animaux. A noter qu’en Gaule, seules les villes de Vienne et de Lyon possède à la fois un théâtre et un odéon.

Ce qui est très intéressant, c’est qu’un panneau explique les différentes parties du théâtre antique aux visiteurs. Durant l’Antiquité, le lieu était clos avec trois espaces bien distincts : l’ensemble de scène, l’« orchestra » et la « cavea ». Passons en revue ces trois ensembles ici à Vienne.

Sur le schéma, vous pouvez remarquer qu’il y avait un mur de scène qui devait atteindre environ 32 mètres de haut. L’« orchestra » désigne la zone située devant les gradins et où s’installaient les chœurs dans les théâtres grecs. Le sol était composé d’un décor en marbre jaune et rose qui a été partiellement reconstitué.

En revanche, ce qui est appelé le « palpitum » (muret en avant de la scène) a quant à lui était reconstruit au 20e siècle afin d’abriter une frise d’animaux issu du cortège du dieu Bacchus.

La « cavea » représente ce que nous appelons les gradins. Elle est divisée en trois parties pour reprendre les trois catégories sociales :

  • Les quatre rangs inférieurs en marbre et séparés du reste par une balustrade sont réservés aux notables.
  • Deux volées de douze et trente gradins sont ensuite réservées aux personnes de condition libre tels que les citoyens, les étrangers ou encore les affranchis.
  • Les esclaves sont relégués aux rangs supérieurs et sont debout.

Afin de pouvoir se déplacer et accéder facilement à sa place, des déambulatoires sous les gradins sont installés ainsi que deux grands escaliers de part et d’autre.

Tout en haut des gradins, se trouvaient deux galeries superposées supportant un portique. Un temple dédié à Bacchus se situait au milieu. Puis une rampe permettait d’accéder au sanctuaire du Pipet.

Les magistrats finançaient des manifestations civiques et des spectacles sur plusieurs journées et cela gratuitement pour les spectateurs. Ce qui étaient appréciés dans le monde grec (comédies et tragédies) sont laissées de côté au profit des spectacles populaires avec du mime qui caricaturaient à force de grands gestes la vie quotidienne.

Lors de son inauguration en 1938, le théâtre retrouve sa vocation première d’accueillir de grandes manifestations artistiques. Le Président Albert Lebrun était présent et a pu assister  à la représentation de « La Damnation de Faust » composé par Hector Berlioz.

Depuis 1981, il accueille notamment le « Jazz à Vienne », un festival attirant jusqu’à 100 000 spectateurs.

Il est grand temps de descendre les gradins pour partir à la découverte de la ville en compagnie de mon amie.

Et nous arrivons devant le jardin de Cybèle. Celui-ci est splendide avec les ruines qui surgissent du tissu urbain. Particularité de ce jardin archéologique : la végétation est dense aux périphéries alors qu’au centre recèle de ruines et de vestiges archéologiques. Cela permet par la même occasion de pouvoir comprendre les différents éléments antiques dont l’espace important qu’était le forum. Si vous cherchez bien dans les décors sculptés, vous apercevrez peut-être le dieu du fleuve 😊

Les murs réalisés avec un grand appareillage pourraient correspondre à la curie (salle d’assemblée) qui pouvait accueillir 800 magistrats sur des gradins encore visibles de nos jours.

ET enfin, les vestiges de la domus (une maison citadine) avec des dimensions importantes est visible ainsi que les terrasses aménagées. Une autre domus pourrait avoir été présente avec la trouvaille d’un fragment de mosaïque aux côtés de la première domus.

Sans oublier, le quartier artisanal actif aux 2e et 1er siècle avt. J.C., au moment où la cité des Allobroges (nom du peuple gaulois) se romanise. Les archéologues ont mis au jour des sols brûlés, des murs en pierre sèche, des fossés remplis de ratés de cuisson de céramiques et d’amphore à vin italienne, dont certaines portent a marque du fabricant.

Notons que plusieurs éléments de ce jardin archéologiques sont inscrits aux Monuments historiques depuis 2012.

Si vous déambulez dans le jardin, arrêtez vous devant le mur recouvert par une fresque de street art composé de personnalités locales ou nationales. Allez-vous les reconnaître ?

Maintenant que vous êtes incollable sur le jardin de Cybèle, continuons notre route et passons près de la place du pilori. Son principe : il s’agit d’un appareil ou d’un poteau auquel on attache un condamné, avec un carcan au cou, pour l’exposer aux regards de la foule et marquer ainsi son infamie.

La place, au Moyen Âge, était à proximité du quartier occupé par les chanoines de la cathédrale d’un côté, et de l’autre, le marché et la halle au blé avec les mesures de pierre.

La place du pilori était l’attraction avec l’exposition des suppliciés et délinquants condamnées par la justice comtale.

La place est bordée par une maison, réalisée d’un seul bloc, en pierre, aucune cour intérieure et avec une façade à encorbellement très sobre.

On continue notre balade qui nous amène devant l’Hôtel de Ville : ancien hôtel particulier du marquis de Rachais, il prend sa fonction municipale en 1771. La façade a reçu deux campagnes de travaux : la première entre 1804 et 1806 pour les pratiques du rez-de-chaussée ; et la deuxième entre 1850 et 1852 pour la loggia du premier étage surmontée d’u beffroi et de l’horloge publique.

C’est le temple d’Auguste et de Livie que je découvre ensuite.

Édifié vers 20-10 avt. J.C, le temple fut dédié à Rome et Auguste et il reste un des rares exemples de transposition du modèle du temple sur un podium dans une cité provinciale gallo-romaine. Plus tard, lui fut ajouté le culte de Livie divinisée (épouse d’Auguste). Le portique à colonnades délimitait autour du temple une aire sacrée. Le temple est dans la lignée du jardin de Cybèle, formant ainsi un vaste ensemble public monumental, exprimant les valeurs civiques et administratives de la cité.

Mon amie Lise continue de m’emmener dans les rues pour découvrir la ville et nous arrivons au niveau du cloître Saint-André-le-Bas, élément faisant partie de l’abbaye du même nom. Elle est fondée au 7e siècle sur des soubassements gallo-romains.

Dès le Moyen Âge, l’abbaye et ses revenus fonciers génèrent une activité commerciale dans la quartier dénommé Saint-Pierre-entre-Juifs. La communauté juive s’étant installée dans ce « bourg des Hébreux » avant d’être délogée au 15e siècle. Au chevet de l’église se trouvait une table de changeurs auprès de laquelle on pouvait bénéficier d’un droit d’asile.

L’église a été reconstruite au 11e siècle, ce qui est rendu possible grâce aux revenus importants du monastère (terres, droits perçus sur d’autres églises). La puissance de l’abbaye décroît au 16e siècle et la fin de la vie conventuelle est définie avec la bulle d’union avec l’abbaye Saint-Pierre. Les bâtiments seront vendus comme biens nationaux en 1791, et seront occupés par la loge maçonnique de Vienne  de 1801 à 1814. L’église figure sur la première liste des monuments historiques  et verra plusieurs campagnes de travaux entre 1920 et 1991.

Le cloître témoigne à la fois de l’Antiquité (avec le chapiteaux corinthiens) mais aussi de l’imagerie médiévale (avec le bestiaire fantastique). En 1860, le cloître est intégré dans un immeuble : des murs partagent la galerie en plusieurs logements. Suite aux travaux de restaurations de 1938, le musée de l’Art Chrétien s’y installe ainsi que dans les salles voisines. Depuis 1978, les salles sont utilisées pour des expositions temporaires.  

La façade occidentale inachevée est endommagée par l’incendie des maisons qui y étaient appuyées. Après l’effondrement partiel de la toiture, la partie supérieure de la façade est détruite. Ce qui reste de visible sont les les fenêtres flamboyantes. Un avant-corps est construit en 1998 pour accueillir la Salle du Patrimoine, dans la cadre de la convention « Ville d’Art et d’histoire ».

Dans cette salle patrimoine, on peut y retrouver toute l’histoire de la ville, agrémentée d’outils pédagogiques accessibles autant aux enfants qu’aux adultes.

C’est au tour du musée des Beaux-Arts et d’archéologie de dévoiler ses secrets pendant cette visite 😉

Celui-ci est situé dans l’ancienne halle aux grains, qui a été construite en 1823, avant d’être surélevée d’un étage pour accueillir le musée. Les collections sont présentées dans trois salles et dressent un panorama depuis la Préhistoire jusqu’au 20e siècle.

Les collections sont assez vastes avec : une défense de mammouth, des épées et haches de l’âge de bronze, des ustensiles de cuisine, des outils agricoles et liés à l’artisanat, des éléments de parure et de toilette.

Pour la période gallo-romaine, il y a des dauphins en bronze doré, un coffret d’ivoire en forme de tête. Sans oublier les armes d’hasts médiévales, d’armures et armes à feu.

Enfin le Salon de peinture, avec un accrochage volontairement resserré, expose des œuvres du 16e au début du 20e siècle avec une représentation des écoles française, flamande, hollandaise, allemande et italienne.

Il est temps de se donner rendez-vous à la cathédrale Saint-Maurice ! 😊

Et me voici devant un magnifique édifice comme je les aime 😊

Le site de la cathédrale est resté le même depuis le 4e siècle, mais l’actuel édifice date du 12e siècle et est réalisé en style roman. Peu d’éléments de cette période sont arrivés jusqu ‘à nous. La construction se poursuit au 13e siècle dans le style gothique. Elle sera consacrée par le pape Innocent IV en 1261 mais verra sa construction se poursuivre jusqu’au 16e siècle.

L’édifice subira des des destructions notamment pendant les guerres de Religion au 16e siècle (vitraux et la totalité des sculptures) alors que pendant la Révolution française, la cathédrale sera transformée en grenier à foin et en caserne. Le culte sera rendu en 1802 mais les deux cloîtres seront détruits pour restructurer le tissu urbain tout autour.

Dans la cathédrale, entre octobre 1311 et avril 1312 se déroulera le Concile de Vienne qui reste dans les mémoires pour avoir ordonné la suppression des Templiers.

Autre date a retenir, c’est juillet 1548. Que s’est-il passé ce jour là ? La dépose du cœur du Dauphin François, fils de François Ier dans le chœur.

L’édifice est connu pour certaines pièces de mobilier comme la série de tapisseries flamandes datant de la fin du 16e siècle. Tapisseries qui retracent la vie de saint Maurice. Elle sont visibles dans le chœur.

Ce qui frappe l’œil des visiteurs est le mausolée des archevêques de Vienne qui se trouve également dans le même espace. Commandé au sculpteur Michel-Ange Slodtz en 1740. Les deux archevêques Armand de Monrmorin et Henri Oswald sont figurés sur le monument, l’un allongé sur le sarcophage et le deuxième venant vers lui. Ce mausolée fait parti des chefs d’œuvre important de la sculpture française du 18e siècle.

Le siège épiscopal situé dans le mur de l’abside n’est un incontournable avec la très belle frise sculptée qui la surmonte.

Sans oublier la série de magnifiques chapiteaux sculptés de style roman représentant soit des scènes historiées ou des décors végétaux.

Et pour terminer, je suis passée devant le chapelle de l’ancien collège des Jésuites. Collège qui a été crée dans le contexte des guerres de Religion. L’autorisation d’ouverture du collège est signée par Henri IV en 1604.

Le collège est construit dans un quartier de la ville considéré comme semi-rural et à l’emplacement d’un des marchés aux bestiaux de Vienne, comme l’indique l’ancien nom de la rue : rue de la Chèvrerie.

L’architecte est Étienne Martellange et il réalise le collège avec deux cours entourées par les bâtiments (un qui sera consacré aux classes t l’autre pour les logements des professeurs et des élèves).

Les Jésuites sont expulsés en 1763 et en 1772, une école de dessin est fondée par l’archéologue Pierre Schneyder. Il utilise les anciens vestiges de la ville pour son enseignement et entreprend une collection : c’est l’origine du musée de Vienne (dont nous avons parlé un peu plus haut dans l’article 😉). Menacé lors de la Révolution, l’édifice restera un lieu d’enseignement et sera même agrandit d’une aile. Depuis 1912, il porte le nom d’un de ses anciens élèves : Pierre Ronsard (un des plus grands poètes de la Renaissance) Pour en sa voir plus sur ce poète je vous invite à cliquer sur le lien suivant et vous deviendrez incollable ! (cela me renvois à mon année de prépa littéraire pendant laquelle j’ai étudié son receuil Les Amours) : https://litteraturefrancaise.net/fr/auteur/pierre-de-ronsard-3/lauteur-et-son-oeuvre/

La chapelle des Jésuites deviendra l’église paroissiale Saint-André-le-Haut après la Révolution française.

Voilà, ma petite découverte de la ville de Vienne se termine ici. J’espère que cela vous donne envie de vous y balader 😊

Voici les liens concernant les articles relatifs au congrès de Lyon et au Monastère royal de Brou :

Et pour terminer, voici le lien vers le site de l’association ANCOVART : https://www.ancovart.fr/

A très vite pour de nouvelles découvertes 😊

Une réflexion sur “Vienne qui pourra

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